En 2021, le musée du Luxembourg a mis les artistes femmes à l’honneur et 2022 semble placée sous le même signe. En effet, après l’exposition « Femmes peintres 1780-1830 », et une monographie dédiée à Vivian Maier, photographe américaine de renom, le musée annonce pour le mois de mars une exposition consacrée aux pionnières des années folles, « amazones, androgynes et révolutionnaires » ! La commissaire, Camille Morineau, est la présidente de l’association Aware et avait été à l’origine de l’accrochages @Elles au Centre Pompidou de Paris.
Qu’est-ce que c’est les années folles ?
La guerre a ensanglanté l’Europe mais l’espoir anime les populations, on pense que c’est « la Der des Der », elle a été tellement affreuse et meurtrière qu’elle doit marquer la fin des guerres européennes. Dans les grandes capitales, et en particulier, Paris, un climat d’effervescence artistique s’installe. Dans tous les domaines, que ce soit la mode, la peinture, la sculpture, le cinéma, la littérature ou la danse, on peut dire que « Paris est une fête ».
Qui sont ces pionnières ?
De grands noms masculins sont déjà associés aux Années folles et l’exposition souhaite faire la lumière sur les artistes femmes qui ont conquis un domaine de liberté à ce moment-là. La place de la femme évolue, la nécessité de redémarrage économique, le « manque » d’hommes suite à la guerre, la modernité avec la démocratisation de l’automobile, sont autant d’éléments qui contribuent à leur émancipation.
Côté artistes, l’exposition se veut pluridisciplinaires, mêlant peintures, sculptures, photographies, œuvres textiles et littéraires. Des artistes célèbres comme Tamara de Lempicka (dont une œuvre a été retenue pour l’affiche de l’exposition), Suzanne Valadon ou Marie Laurencin côtoient des artistes oubliées comme Mela Muter.
A Montparnasse, l’Académie de la Grande Chaumière, école mixte, permettait aux femmes de bénéficier de la même éducation artistique que leurs collègues masculins, et de peindre d’après des modèles… y compris de nus masculins. Les nouvelles Èves peuvent enfin peindre Adam. Si l’École des Beaux-Arts est ouverte aux femmes, les cours ne sont pas mixtes et un seul atelier leur est réservé jusqu’à la fin des années 20. Elles sont donc nombreuses à faire le choix des écoles et académies privées. Si Paris est le centre névralgique des Années folles, et encore plus le quartier de Monparnasse et ses Montparnos, nos pionnières viennent des quatre coins du monde.
Ces artistes ont aussi posé la question du genre, notamment Anton Prinner, et celle de la libération sexuelle : les œuvres érotiques de Gerda Wegener en témoignent.
Les grandes oubliées
La crise de 1929, les tensions grandissantes en Europe dans les années 30 et la deuxième guerre mondiale, mettent un terme à ce climat d’euphorie, faisant presque oublier le rôle et l’importance de ces pionnières. En novembre 2021, Joséphine Baker entrait au Panthéon : icône des années folles et espionne pendant la guerre, elle témoigne du regard nouveau que l’on pose sur ces figures féminines. Un siècle plus tard : il est grand temps de les redécouvrir et les mettre en pleine lumière !
Visuel : Romaine Brooks, Au bord de la mer (détail), 105 x 68 cm, 1923, huile sur toile, Musée franco-américain du château de Blérancourt
© Droits réservés / photo Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. Rmn-Grand Palais / Gérard Blot